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mas, une Anglaise en chandail jaillissait au moindre appel !

Rien ne prouvait d’ailleurs que le naufragé fût bien Italien. J’allais à la recherche d’autres indices, aussi acharnée à identifier cet ancêtre que si c’était le mien et que si les hommes se reproduisaient par marcottage, quelques générations après leur mort, sans intermédiaires palpables. C’était un marin, on le voyait à de petites ancres gravées sur les écorces et les pierres ; c’était un homme qui avait quitté l’île, y était revenu, on le voyait aux bêtes dont la présence ne s’expliquait que par voyages dans d’autres continents : il y avait des fourmiliers, mais pas une seule fourmi, et ils mangeaient les écorces et les feuilles comme l’eussent fait les fourmis mêmes. Il y avait des mangoustes, mais pas un seul serpent, et elles se vengeaient sur la seule chose commune aux autres espèces et aux serpents, sur les œufs. Je trouvai quelques ossements d’animaux venus dans l’île déjà vieux, ou isolés et sans femelle ou mâle, un chien, un chat, espèces éteintes pour moi désormais, espèces ancestrales. C’était tout. À part les dix centimes italiens, que je glissai dans une fente de corail comme pour que toute la mer se mît à jouer une marche, — l’appareil ne fonctionnait plus, la mer se taisait, — pas