Page:Giraudoux - Simon le pathétique.djvu/69

Cette page n’a pas encore été corrigée

L’ÉGOLE DU SUBLIME 61

qui était difficile, c’était la voir. Elle se cachait. Il fallait des ruses pour la rencontrer ou la surprendre, sur un fauteuil où alors elle feig, ·nait ’de dormir, J- mais, une fois découverte, elle était à votre merci, elle parlait sans arrêt, vous disait sa vie, son passé, son avenir... puis, dès qu’on ne la surveillait plus, disparaissait et redevenait pour des semaines insaisissable. Je vis aussi des bouches sensuelles, des épaules rondes, des yeux bleus et noirs débordant de candeur, de feu, de doux plaisir... Je pourrais toujours, si je ne me mariais point, faire une fin, avoir ’quelque grande passion... Mais il semblait bien que ce recours dût m’être épargné. Tous s’accordaient à me prédire un mariage prochain, une — femme parfaite. Personne ne s’avisait.de penser que j’entretenais une actrice, qu’une ouvrière délaissée me tuerait. La somnambule du quartier des Invalides mit même tout ce futur au présent. —·— Tu es marié à la femme qui fut faite pour toi, me révéla-t-elle, tu as de beaux enfants... Le même soir, au premier livre que je pris sur ’un rayon, .l’antiquité aussi me tutoya et me parla de mes fils.

lllm de Liville songea donc à me marier. Deux fois par semaine, à sa table, je fus installé près