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de vivre cent ans. Je conservais mes vers latins pour les relire vers 1980, dans mon extrême vieillesse, mon discours en prose rythmée sur les émeutes pour le remettre en 1930 à mes fils, en 1948 à mes petits-enfants. Je ne me hâtais pas, je n’apprenais à connaître chaque année que les auteurs du programme, à l’exception des auteurs étrangers, tous égaux en inutiles familiarités, en lyrisme sans âge, dont on pouvait lire sans progression l’œuvre éparpillée au hasard par l’économe dans les bibliothèques, Camoëns en sixième, Byron en septième étude. Je ne sortais jamais, je recevais peu de lettres ; c’était l’époque où l’on modifiait tous les six mois la vignette de nos timbres-poste : il est des modèles que mon père ne trouva pas le temps d’employer. Enfin, en rhétorique, le vieux siècle s’effondra, au milieu d’une année scolaire, au milieu d’une semaine, malgré l’empereur d’Allemagne, vous vous rappelez, qui voulait le soutenir encore un an. Tous ceux qui n’avaient été jusque-là pour notre classe que de proches aînés, Lamartine, Michelet, Hugo, passèrent le second cercle du Styx. Je me dégageai d’eux. Je renonçai, par des généalogies fictives, à me faire le cousin de Vigny, le petit-fils de Chateau-