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’ TRIOHPHI DU PATHÉTIQUI 201

à me laisser emporter jusqu’où l’on change A de voiture. C’était un bon train, on ne changeait qu’au Bosphore. C’était un train de nuit après lequel les chiens aboyaient mais ne couraient pas. Une lune éclatante me permettait de surprendre au passage les stations où j’attendais, enfant, les trains qui s’arrêtent ; la gare où deux missionnaires m’avaient parlé du Canada et un Italien y jouait du violon ; celle où la neige nous -avait ensevelis, et l’on y collait des affiches d’A bbazia. Une langueur, une mollesse déblayait tous les coins glacés et rudes de ’ma mémoire. Dés maisons arrêtées près des étangs, des poulai-ns près des barrières, attendaient modestement sur place l’aube que j’allais chercher en Orient même. A travers la cloison, j’entendais Lyzica, la petite Roumaine, — dix amies au départ avaient crié son nom — remonter son réveil, essayer par des chansons sa voix de demain, chantant en mots français ce que des voisins peuvent entendre — Adieu, train I Bonne nuit, signal d’alarme ! L — et en roumain tous ses secrets. Puis mon ampoule s’éteignit au milieu d’une grande ville, car le conducteur, ennemi des transitions, s’ar- g rangeait chaque fois pour que la lumière de