Page:Giraudoux - Simon le pathétique.djvu/20

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

D’immenses cours sans arbres. D’immenses dortoirs dont les fenêtres donnaient sur le terrain d’une caserne. Au lever, en voyant au-dessous courir et manœuvrer ces uniformes, on avait l’impression qu’après la classe au second étage, après l’étude au premier, à midi l’on sortirait soldat. La sonnerie du clairon au réveil et au couvre-feu, une demi-heure avant notre lever, une demi-heure après notre coucher, encadrait la journée d’une marge, d’un temps neutre et libre pour lequel nous réservions nos gambades, nos folies. Je trouvai tout en abondance : dans mes rêves les plus heureux j’avais juste imaginé le lycée. Les poêles ronflaient à rouge. Chaque étude possédait des dictionnaires historiques, sa bibliothèque, son atlas. J’eus le jour même trente volumes, sur lesquels j’écrivis mon nom ; j’eus d’un seul coup vingt professeurs.

Travail, cher travail, toi qui terrasses la honteuse paresse ! Travail d’enfant, généreux comme un amour d’enfant ! Il est si facile, quelle que soit la surveillance, de travailler sans relâche. Au réfectoire, alors qu’on distribuait les lettres, j’en profitais, puisqu’on ne m’écrivait jamais, pour relire mes cahiers. Le