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RETOUR D’ALSACE

relève et pousse le plus vite. La nuit ne se dégage des sapins qu’en y laissant ses nuages les plus noirs, sur lesquels il pleut aussi. Arrêt à Urbès, les mieux éveillés font face à la route, les plus tristes face à la rivière. Le 1er bataillon nous rejoint. Il est gai, et chante, car on l’a fêté toute la nuit. Aux fenêtres, tout ce qui se peut voir d’Alsace vivante à cinq heures du matin, quelques épaules rondes entre des rideaux noirs à fleurs roses, un sein à demi dégagé, un bras blanc qui relève un store, une petite fille entière, qu’on a assise sur la fenêtre et qui lance des fleurs en papier ; un gamin sans veste qui escorte, ce n’est pas un gamin juif, notre vieux tambour ; des chiens de garde, silencieux, car la guerre leur apprend chaque jour à douter de leur métier. Un moulin, une usine, avec une plaque française d’assurances contre les incendies : ils n’ont jamais brûlé ; la douane, où Tantôt se pèse sur la bascule ; il a pris un kilog en Alsace. Le jour est levé. Le général qui galope le long de sa brigade, reproche avec aigreur au colonel d’avoir un bataillon triste et un bataillon gai. Impartial, le colonel passe chaque demi-heure avec l’un, et la demi-heure suivante avec l’autre. Deux vaches à clochette que notre avant-garde a séparées essayent vainement de se joindre par les intervalles des compagnies,