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trer dans leur vrai corps. Elles s’attaquent à tout, mais tout s’acharne à les contrarier, par représailles, et elles le savent : s’il pleut, elles le prennent pour elles.

Elles se demandent pourquoi la blouse de Nini se noue au dedans, par des faveurs bleues, et elles enragent de la voir, sans hâte et sans étonnement, s’orienter dans la grand’rue. C’est qu’elle est, aujourd’hui, chez elle. C’est que ce soir, sous le bourg entier, Paris, canevas de toute ville, transparaît. Un vieux monsieur, sur le quai droit de la route, bouquine la ferblanterie ; derrière l’adjointe se hâtent deux hommes à moustaches qui sont des agents en civil, et un autre vieillard, sortant de sa maison, la salue, lui offrant sans doute sa place d’intérieur ; puis il reste sur la plate-forme, à fumer. Au bout de l’avenue, l’arc de triomphe se couche. Une calèche passe à vide, en maraude, puis repasse, sans répondre à vos appels. Un ouvrier sortirait du bazar pour étreindre la Parisienne dans ses bras, et l’embrasser avec furie, et l’égorger placidement, qu’on ne s’en étonnerait point. On s’attend à prendre des numéros pour entrer chez le percepteur.

Par bonheur, dans sa salle d’attente, nous