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jeunes filles qu’il avait vues de la portière. Ce ne pouvait être qu’elle ; sa gorge royale palpitait au rythme de ses paupières. Câline, l’aînée le présenta :

— Monsieur l’agent voyer. Il murmura, désolé :

— Oh ! madame ! Oh ! madame !

Elle le dévisageait, à demi étonnée, tandis que Câline cadette le nommait à une autre dame, à laquelle il n’accorda aucune attention, et qui, dépitée de l’impolitesse, s’en fut en avant avec M. Pivoteau.

L’agent voyer offrit à la première son bras, dont il ne savait justement que faire. Elle s’y appuyait du bout des doigts et pourtant il la portait toute. Une larme tomba de ses yeux, sans qu’il sût pourquoi, et il pensait, comme les enfants qui voient pleuvoir en plein soleil : C’est le diable qui bat sa femme. Une seconde larme tomba sur la main dégantée de sa compagne :

— Tiens, il pleut, dit-elle.

— Pas de bien haut, répondit-il.

— C’est un nuage, dit-elle.

— Qui passera, répondit-il.

Il aurait badiné ainsi mille ans, confondant à