Page:Giraudoux - Provinciales.djvu/175

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— C’est un charme de plus, ripostait l’agent voyer. Voyez les Américaines. Ou plutôt, voyez les Allemandes. L’Allemande ne fait pas la liaison, et c’est la meilleure musicienne du monde. Je vous l’assure, c’est un charme.

— C’est une maladie, affirma Mme Rebecque, et son ton ne souffrait pas de réplique. Coco sera française dans son chant, comme elle l’est dans toute sa manière d’être. Les Allemandes mangent à la brasserie : Coco sera cuisinière, ainsi que Lulu d’ailleurs. Les Américaines dansent le cake-walk : Coco polkera et elle mazurkera, et elle quadrillera, si la danse ne lui donne pas de palpitations. Voyons, Coco, sois sérieuse ; essaye de dire, en faisant les liaisons, la première phrase venue : j’aime les choux et les perdrix, ou bien j’aime les perdrix aux choux ; ou ce que tu voudras, mon petit Coco.

Coco tourna la tête, comme si la phrase de sa mère était chiffrée, et lui ordonnait de contempler M. Danton qui se curait les oreilles du petit doigt, et qui, surpris par le regard de la jeune fille, se secoua violemment le lobe, comme s’il y découvrait subitement une boucle d’oreille, — pour donner le change.