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la plaisanterie et continuait avec la même conviction ; il y avait encore Lulu Rebecque, qui offrait le sucre et la bénédictine, modestement, sans insister, comme si elle les avait faits elle-même ; et, tout près d’elle, l’agent voyer, qui avait eu sur la pince des mots cruels, et se servait à sa place du pouce et de l’index de la jeune fille.

— Quel original vous faites ! disait la noire Mme Rebecque, mais elle pensait :

Quel gendre il pourrait faire, marié à Lulu s’il aimait les brunes, ou au besoin à Coco, si, mon Dieu, il préférait les blondes. C’était un travailleur et un modeste ; au lycée de Bourges, il avait déjà tous les prix, et maintenant encore, sous sa brosse de cheveux roux, il avait l’air doré sur tranches.

Voilà, justement, qu’il félicitait Coco, qui fredonnait toujours pour n’avoir pas à répondre. La maladroite ! Sa mère dut prendre la parole.

— Vous la gâtez, dit-elle ; le médium est bon, mais Mademoiselle a sa tête, et le diable ne lui ferait pas faire les liaisons. J’en suis réduite à lui faire chanter et rechanter le cinquième acte de Faust, où l’on n’en trouve que trois.