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du manège, et que le tournoiement battait et embrouillait comme un écheveau ; celle du musée à vapeur, articulée, battant le pas une minute et repartant, passionnée ; celle du cirque, si proche que le piston s’adressait directement à vous. Jean, infiniment ému, y reconnaissait son chagrin, et une grande pitié le prenait des pauvres musiciens et de lui-même.

La vie serait pourtant si simple si les employés la surveillaient sans conteste ! Cambronne, franchement, n’a pas raison, et Bavouzet ne peut comprendre, et le petit duc a tort. Oh non ! les négociants ne sont pas les seuls à être bons ; les fonctionnaires ont une délicatesse que vous ne connaîtrez jamais parce qu’elle ne s’étale pas en fleurs à l’étalage et en rubans à vos pochons, mais le percepteur veille jusqu’à minuit quand les comptes de gestion sont arrivés, et il passe les heures de son sommeil à chercher les prénoms d’inconnus qui ont le même nom de famille, pour leur éviter de confondre leurs impôts. Le contrôleur ne va pas voir au grenier quand vous déclarez que votre bicyclette est vendue ou démontée, et il vous raye sans plus des registres. Les institutrices sont méfiantes et distraites, mais peut-être