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par lotions et par pâtes, leur union ; il frotta doublement ses mains qui avaient tellement touché le passé. Il s’assit nu sur une chaise, s’étendit nu sur le tapis, essaya à vide sa liberté, se réjouit de n’avoir aucun grain de beauté, aucun tatouage. Puis, pour quelques heures, il se rhabilla, négligeant de mettre son gilet, comme les jours où il allait au bain. Il était rassuré. Il avait eu l’appréhension ce matin de trouver son corps lui-même un objet trop familier, trop semblable, d’en être las. Cela eût été fâcheux. Cela lui eût donné à croire que son mal était simplement de la neurasthénie, et non point une ambition effrénée, l’ambition de changer l’aiguillage même que le destin avait donné à sa vie. Tout à l’heure, quand il s’était vu dans la glace, rien ne lui avait paru plus neuf, plus ambigu même, que ces yeux dont il connaissait