3o ÉCOLE DES INDIFFÉRENTS
un océan de joie ou de tristesse auprès duquel nous sommes bien peu. Humbles et parfaits, mes disparus sont mes esclaves. Ils m'appar- tiennent, tant je les vois distinctement, comme m'appartiendrait un mort dont j'au- rais le portrait, alors que sa famille n'en pos- sède point. Et ce sont aussi les seuls auxquels je consente à plaire : à cause d'André Bovy, malgré l'averse, je vais marcher, lentement, sans parapluie, jusqu'à la gare : au nom d'Edith je veux arriver à ce bec de gaz avant l'omnibus qui galope derrière moi. J'y suis. Je respire. Vive Edith! Le cocher continue à fouetter ses chevaux, sans voir que la course est finie.
Et quelle compassion n'aurais-je pas p®ur Etienne lui-même, s'il venait à mourir! Quelle désolation de le voir étendu au milieu de sa famille en pleurs! Seids, dans la mort, les corps de petite taille deviennent des statues; le sien, grand et osseux, serait étriqué, ployé, pitoyable. Son sourire éternel me dirait : — Tu vois enfin .î^ qu'avais-je besoin de me hâter dans cette vic.»^ Ma flânerie, mon igno- rance s'expliquaient : on meurt. Apprends,
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