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LF. FAIRLE P.rRNVRD l85

Brenne dont les habitants ont le ventre janne, ilexible, la Creuse s'effilait sur les collines de meulière. Avant le coucher du soleil, pour être prête à son lever, la campagne déjà s'endormait, comme les coqs astucieux. Elle s'endormait; elle ronflait un peu, la cam- pagne. Pas de murmures ou de cris, pas de fumées. Comme elle paraissait vaine, la légende qui veut qu'il y ait des hommes. Il était si clair, ce soir, qu'il n'y en a point, qu'il n'y en a qu'un, ou deux. Pas de chan- sons. Et, justement, il était là-bas à la lisière des champs, l'unique homme, donnant à l'uni- vers sa véritable échelle. Etalon invariable, le jour n'avait dilaté, le soir n'avait emporté que son ombre. Il suffisait de le mettre en regard du ciel pour voir que c'était le ciel, peu à peu, qui diminuait.

Le village était célébré par les géographes parce qu'il marquait à peu près le milieu de la France. On ne savait à vrai dire si c'était l'église ou le rond-point qui occupaient le centre exact. Comme le pôle, il devait va- rier, suivant les années, mais on se sentait presque, conmie au pôle, au faîte d'un demi-

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