174 ÉCOLE DES INDIFFÉRENTS
sans émotion ? Et il en est de l'esprit comme du corps. Le génie? le sublime? Cela existe- t-il? En avez-vous jamais eu l'impression? Quand je lis un chef-d'œuvre, il me semble, en effet, que c'est très beau, très habile, mais c'est justement, à une ligne ou à une césure près, ce que j'étais capable d'écrire. Il n'y a pas un vers dans Racine qui par nature dé- passe, non pas mon intelligence, mais mon adresse. J'aime comme il aime. Je suis pré- cieux cL ardent et sévère. Dans Victor Hugo, un seul distique, que je ne vous dirai pas. J'aurais pu surtout, je crois, écrire tovit Théocrite. Je devinais que deux bergers, dans un pays que j'imaginais vallonneux à la fois et marin, avaient été voir renaître le prin- temps. Je devinais que deux Syracusaines, vêtues d'étoffes mordorées à revers cerise dont je n'avais qu'à copier les noms dans le dictionnaire d'antiquités, avaient, bavardes, agaçantes, voulu voir mourir Adonis. J'allais composer des poèmes que j'aurais appelés idylles, c'est le terme classique, quand je les ai lues, par ])onheur.
— Vous plaisantez toujours! Et il n'y a
�� �