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brigand qui l’avait étendu sur un lit, qui coupait les pieds de ses victimes quand ils dépassaient à travers les barreaux de cuivre, quand les jambes étaient trop courtes qui les allongeait par des supplices — lui avait eu juste la taille ; — ce cheval indomptable qu’il changea en agneau, qui avait peur de son ombre, qu’il monta simplement un jour de pluie, les autres jockeys étaient pâles de fureur, inondés… Soudain, à pas de loup, doucement, l’enfant qui a trouvé une boîte de tisons veut allumer des taches de soleil sur la vérandah et met le feu à la maison.

Un soir…

Mais cela c’est mon histoire.

Écoutez…

Un soir, rentrant de l’exercice, j’appris par le portier du Harvard-Club que Clyton m’avait demandé quatre fois et qu’il attendait dans ma chambre. Mais c’était mercredi, le jour où venait le courrier de France, et je ne me hâtai point. J’avais depuis trois mois l’habitude d’ouvrir aussitôt mes lettres et de les lire debout, appuyé au bureau du caissier. Je l’aurais désobligé en les emportant intactes. Il me souriait en silence, et derrière le pupitre d’en face la téléphoniste évitait de parler haut, comme pour me laisser téléphoner dans un pays lointain. La dernière lettre lue, il demandait si tout allait bien en France. Tout allait bien. Les mercredis sans courrier, il me consolait et me donnait