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La voici de retour, toute pâle de joie,
Pensive, amenant vers le château pavoisé,
Au caprice léger d’un frôle fil de soie,
Le monstre éblouissant par elle apprivoisé :

La tarasque, la bête effrayante et vorace,
Ouvrant entre ses poils, semblables à des cils,
Par les trous rayonnants de sa noire cuirasse
D’innombrables yeux d’or, d’opale et de béryls.

Les singes grimaçants lâchent les paons fidèles ;
De stupeur, le bouffon retombe sur ses pieds ;
Le perroquet du roi s’envole à tire d’ailes,
Et le maître, aux abois de ses longs lévriers,

Du haut de son balcon éperdument se penche,
Soutenu par le chœur bariolé des preux,
Se pâme d’allégresse, et dans sa barbe blanche
Laisse, les bras tendus, couler des pleurs heureux.

La tarasque reluit, s’allonge et fait la belle,
Diaprant le pavé de reflets irisés,
Et d’un air alangui lèche les mains de celle
Qui la conduit en laisse au bout de ses baisers.