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ELIANE (hors d’elle)

Frappe-moi, meurtris-moi, mais parle. Ton silence
Me tue. Oh ! par pitié, vois ce cœur qui s’élance
Frileusement vers toi comme un oiseau mouillé.
Il saigne, si la vie amère l’a souillé,
Il saigne, mais ce sang lave comme un baptême.
Sois bon, ne raille pas, aime celle qui t’aime !
Calme-la, guéris-la d’un baiser tiède et pur !
Réapprends-lui, Pierrot, la lumière et l’azur !
Je t’aime… Écoute-moi !. . Je connais ta souffrance,
Et je la guérirai ! Laisse cette espérance
Voltiger dans mon cœur comme un parfum subtil !
N’est-il pas vrai que tu souffrais hier, n’est-il
Pas vrai ! Rappelle-toi, Pierrot, ce soir de fête…

PIERROT (à part)

Je me rappelle tout !… O cette étrange tête
Fraternelle et si douce, et qui me ressemblait !
Cette tête pensive et pâle qui voulait
Partager ma chimière et ma mélancolie !
La reverrais-je encore si j’aimais l’autre ?.. .(A EUane.)0\ibli&\
Oublie, ô ma pauvre âme en émoi ! Cet amour
Qui te métamorphose et t’éclaire, le jour
Où j’en aurais pitié, deviendrait de la haine !
Écoute… C’est la fin de toute ivresse humaine,
Et ce serait la fin de la nôtre, vois-tu !
Si je refuse, va ! ce n’est point par vertu,