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TROISIÈME ABBÉ

Chante ! cette heure est frêle et pleine de gavottes.
Regarde ces flacons : on dirait des dévotes !
Une câve à liqueurs, pour nous, c’est un couvent
Très doux et très béat, onctueux et fervent.
La chartreuse vous a des airs de pénitente
Qui veut vous convertir, et dont la chair vous tente.
Elle a le charme obscur d’un amour interdit,
Sucre et velours, impie, et quelque peu maudit.
On boit ! c’est comme si l’on baisait une abbesse…
On éprouve un besoin de courir à confesse !
Et de se faire absoudre, et de recommencer !

DEUXIÈME ABBÉ
Il ne nous entend pas ; à quoi peut-il penser ?

TROISIÈME ABBÉ

Fais un signe au jubé ! Des musiques dormantes S’évaderont pour nous des cumins et des menthes, Et le riche plain-chant mystique des liqueurs Comme un orgue puissant réchauffera nos cœurs !

PREMIER ABBÉ
Je crois qu’on l’a bouché !