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Scène VI


(Un vallon pierreux, d’où l’on voit au loin le palais magique. Le soir tombe. Un orage s’amasse dans le ciel de cuivre. Éros, dans une attitude d’accablement, est assis sur un bloc de marbre.)

Éros

Le soir tombe, ô Psyché ! L’ombre des monts s’allonge.
Ton pauvre cœur, en proie au doute qui le ronge,
Compte en battant les pas du passant attardé…
Et moi dans ce ravin solitaire je songe…
Ai-je vraiment senti le plaisir demandé ?
Ou bien l’ai-je donné sans le prendre moi-même ?
Et si j’ai su tromper une vierge qui m’aime,
Ô détresse divine ! Ai-je vraiment aimé ?
Ou n’ai-je déserté l’Olympe blasphémé
Que pour faire tomber dans un piège invisible
Par la ruse et la fourbe un pauvre être bien né
Et qui, si j’étais homme et non maître impassible,
Se serait simplement, de soi-même, donné ?

(La silhouette d’un berger apparaît dans le vallon.)