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Où le champ labouré rend plus doux l’homme dur,
Et la première étoile émerge de l’azur !…

Mon père au front chenu, ma mère vénérable,
Les yeux rouges encor de ma fin misérable,
Sont là, n’osant parler de peur de me nommer.
Ah ! qu’un rêve nouveau, d’une aile secourable,
Sous leur toit familier daigne me ramener !
Dans l’ombre domestique une lampe palpite…
À côté de mes sœurs je suis toute petite !
Notre couche sent bon la lavande et le thym…
Nous dormirons toutes les trois jusqu’au matin !…
Hélas ! je ne dois plus revoir leur cher visage !…
Ô mon père au front blanc ! Certes vous fûtes sage,
Vous fûtes sage aussi, ma mère aux tendres yeux,
De faire en me livrant la volonté des Dieux !
Mais moi, sans attirer la foudre sur ma tête,
Agnelle expiatoire au sacrifice prête,
Je puis pleurer tout bas, loin du foyer quitté,
Sur ce qui pouvait être et n’aura pas été !…

La nuit tombe… C’est le moment…
(Elle se lève.)
La nuit tombe… C’est le momentÔ Dieux terribles !
Vous à qui nous donnons, pensant vous attendrir,
Le nom de notre crainte et de notre désir,