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l’avait appelé. Rebb, assis sur un tas de briques, était pâle comme un mort ; il avait les yeux brillants et tremblait de tous ses membres.

« C’en est fait de moi, dit-il d’une voix entrecoupée, et je ne veux pas mourir comme un mauvais chien, sans t’avoir demandé pardon de mes mauvaises paroles ; tout est arrivé par ma faute. »

Comme il s’était évanoui sans en pouvoir dire plus long, Schukraft le prit sur son dos, l’emporta chez lui, le mit dans son propre lit, le confia aux soins de sa femme et courut cher-cher le médecin. Le médecin se fit raconter par le menu détail les incidents du voyage et secoua la tête en disant : « Émotion trop forte après un déjeuner trop copieux.

— Quand je le disais ! s’écria le malade avec exaltation, tout s’est tourné contre moi, tout, tout ; mais c’est bien fait ! »

Pendant toute sa maladie, qui fut longue, il répétait continuellement : « C’est mauvais d’être trop fin ! »

Il vient seulement d’entrer en convalescence ; les gens du village disent que son repentir ne survivra pas à sa maladie. Schukraft prétend le contraire. Il faudra voir.

Le maître d’école du village et les mères qui ont des petits garçons désobéissants (c’est-à-dire presque toutes les mères) leur citent l’exemple des deux petits cochons qui ont péri par la dent du loup, pour avoir voulu en faire à leur tête.