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Je ne sais quel instinct me fait chérir la vie,
Quel parfum d’avenir me présage un beau sort,
Me dit : Tu connaîtras la gloire sans envie,
Et l’amour sans remords.

Oui, je crois au bonheur, à ma brillante étoile ;
Un ange protecteur me guide par la main,
Et j’irai jusqu’à Dieu sans déchirer mon voile
Aux ronces du chemin.

Comme on croit au printemps que l’hiver nous envoie,
Comme au sein de la nuit même on attend le jour,
Triste… je sens venir une indicible joie…
Seule… je vis d’amour !

Celui qui doit m’aimer, celui que j’aime existe ;
Invisible pour vous, il enchante mes yeux,
Il m’apparaît charmant, à ma vie il assiste
Comme un esprit des cieux !

Et je rougis de crainte à sa seule pensée,
Et, comme en sa présence on me voit tressaillir,
Comme s’il était là, dans ma joie insensée,
J’ai peur de me trahir.

Ce rêve de mon cœur n’est pas une chimère ;
Il viendra… Loin de lui n’entraînez point mes pas,
Gardez-moi près de vous… Oh ! laisse-moi, ma mère,
L’attendre dans tes bras !


Ces vers causèrent tant de plaisir, qu’on en oublia la préface, qui d’abord avait fait rire. Clarisse était charmante en les disant ; son re-