Page:Girardin - Fausse route, 1897.djvu/28

Cette page n’a pas encore été corrigée

Frimousse.

Ma mère m'ayant pris par la main me fit entrer à la cuisine, et me donna un verre d'eau sucrée pour me remettre. Ensuite elle me montra Frimousse, qui s'était réfugiée sur le toit d'un petit hangar et se régalait à nos dépens.

Tout en dévorant sa proie, elle penchait la tête tantôt à droite, tantôt à gauche, par brusques saccades, comme si elle avait trouvé le bœuf trop dur pour elle. En même temps elle nous regardait, ou plutôt elle me regardait, moi, avec une expression de menace et de défi.

« Tu vois bien, maintenant, que c'est-elle, me dit ma mère, de son ton de voix affectueux et caressant; n'est-ce pas, mon petit, que tu le vois bien?

— Oui, maman, je le vois bien. »

Ma raison, l'évidence, l'affirmation de ma mère, tout enfin me disait clairement que c'était Frimousse que j'avais vue dans le corridor; malgré cela, quelque chose, en moi, protestait. Comment Frimousse, que je connaissais si bien, aurait-elle pu me paraître si énorme?

D'un autre côté, pendant qu'elle achevait son festin, ses regards devenaient de plus en plus menaçants; j'y trouvais même quelque chose d'étrange, de surnaturel; je