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Rédemption.

— Veuillez donc être assez bon, monsieur, de me remettre mon siège.

Alors, mademoiselle, qui, sans doute, en avait vu bien d’autres, me dit avec cynisme :

— Ah ! vous ne connaissez pas monsieur, je vais vous présenter.

Et se tournant vers le nouveau venu :

— Monsieur… monsieur… comment vous appelez-vous déjà ? Pardonnez moi, j’ai si peu de mémoire.

— Monsieur Duval.

— Monsieur Duval, monsieur Costigan.

Lui, de me tendre la main. De colère et de honte, je ne pus d’abord prononcer une parole. Puis j’éclatai :

— Merci, je n’y tiens pas, fis je en tenant mes deux mains derrière le dos.

Là dessus, il se lève pour me céder la place. Et bien ! monsieur, quelque peu croyable que cela soit, cette demoiselle qui, au mépris des lois les plus élémentaires des convenances, s’était présentée elle-même à ce jeune homme, il y avait quelques minutes à peine, s’écrie avec colère en lui posant sa petite main gantée sur le bras : « Ne vous occupez pas de lui. cher monsieur ; il faut être ou jaloux ou ivre pour agir comme il le fait. Vous êtes bien mieux élevé que lui. » Oh ! shocking ! monsieur, shocking ! Et voilà à quoi tient l’amour. Jamais on ne m’y reprendra. Qu’en pensez vous ?

— Je trouve que c’est là une aventure fort heureuse pour vous.

— Vous vous moquez. Comment cela ?

— Certainement, puisque cette jeune fille, indigne de votre amour elle vient de vous le prouver…

— Hélas !

…par ce que vous m’avez dit, aurait pu vous abuser des années durant. Vous l’eussiez épousée peut-être.