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LE CONSCRIT IMPÉRIAL

garçon. Tu es jeune, toi, et plus en état que moi, de protéger la petite.

reine

Et votre jambe de bois, grand-père ?

gamache

Nom d’une pipe, c’est vrai. Ah ! si ce n’eût été de ce maudit boulet d’Austerlitz. Une belle journée tout de même.

Le P’tit Caporal, crânement assis sur son cheval blanc, embrassait, du haut d’un monticule, toute l’étendue du champ de bataille. Soudain, nous voyons venir à nous un des aides-de-camp de l’Empereur. L’ordre était donné aux grenadiers de percer une muraille de soudards autrichiens. Mille millions de bombes ! ça chauffait fort, vous dis-je. Mes braves compagnons, autour de moi, sont fauchés par la mort. Qu’importe, cré mille tonnerres, nous avançons toujours. Ce n’est plus qu’une horrible boucherie. Un grand diable de cuirassier veut me pourfendre d’un coup de sabre. Je lui réponds par la crosse de mon fusil, bien appliquée sur la tête, et lui arrache le drapeau qu’il tenait à la main. Nous avons franchi la redoutable ligne, mais voici que contre nous, cent bouches à feu vomissent la mort. C’est alors que ce maudit boulet vient me fracasser une jambe. Le lendemain, le P’tit Tondu me disait