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LE REPORTER
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Le reporter, lui, coudoie tantôt un roi, tantôt un mendiant, dîne avec l’un, déjeune avec l’autre, prend ses notes à la hâte et, bien souvent, n’a que dix minutes pour rédiger un article d’une importance capitale, qui attirera sur sa tête ou les foudres de la justice ou une engueulade de ses chefs.

Aujourd’hui, on le voit dans une salle d’hôpital ; demain, il foulera le bruxelle d’un palais ; maintenant il parcourt le globe en touriste ; tantôt on le rencontre sur le champ de bataille, au premier rang, exposé à cent dangers. Témoin, ce reporter, qui, s’étant transporté à cheval sur les lignes avancées, se fit poliment décapiter par un boulet, au moment où il se rendait compte de la position de l’ennemi.

Diplomate en interviewant de rusés mortels qui veulent rester muets comme carpes, marin, médecin, avocat, critique, censeur, agriculteur, chasseur, le reporter est un véritable caméléon humain, prenant la couleur de tout ce qu’il touche, traitant autant de sujets qu’il y a de jours dans l’année, et s’aventurant sur les terrains les plus inconnus, sinon toujours avec sécurité et confiance, du moins avec une audace souvent digne d’un meilleur sort.

Mais, si le reporter, au nombre desquels on a déjà compté Chateaubriand et Victor Hugo, ont à remplir une belle mission souvent mêlée de grands dangers, qu’en pense-t-on parmi le vulgus ?

« Moi » dit un jour un barbier : « je ferais un s… bon rapporteur, je rase tant de monde, voyez-vous ».