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MOSAÏQUE

Il faisait nuit.

La neige tombait lentement, à gros flocons irréguliers, fantasques. On eût dit que les anges, là-haut, là-haut, jouant dans les prés célestes, laissaient tomber sur la terre le duvet de fleurs sur le point d’éclore.

Le sol durci était blanc, les arbres étaient blancs, les chaumes étaient blancs, tout était blanc, immaculé.

La plainte de la girouette criarde, le miaulement aigu de quelque chat égaré sur les toits et le hurlement de quelque gros dogue à la chaîne, étaient les seuls bruits qui interrompaient le profond silence de la nuit.

D’un sommeil léthargique, la nature semblait endormie.

Que voulaient dire, cependant, ces pâles rayons que l’on voyait briller à travers les noirs carreaux des habitations ? Que signifiait cette fumée bleuâtre qui s’échappait en spirales des cheminées et allait se perdre dans l’épaisseur de la nuit ? Pourtant, l’heure du couvre-feu devait être sonnée depuis longtemps. Et les habitants de Grand-Pré, debout à la première heure du jour, n’aimaient pas à prolonger leur veille, afin d’être frais et dispos le lendemain.

Là-bas, en haut de la route, assise sur une montée comme une reine dominant, du haut de son trône, ses humbles sujets, est la modeste église. Ses fenê-