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FLORENCE

Heureux, très heureux, Hubert revient lentement à pied. La nature commence à chasser la torpeur de la nuit. Comme un globe de feu au travers d’un voile, le soleil disperse les nuages. Il laisse voir un ciel plus pur que le jour qui se contemple dans les ondes lisses et majestueuses du Saint-Laurent.

Les piverts, les oiseaux moqueurs, les engoulvents, les grives, les gobe-mouches, envoient dans les airs des notes confuses. Ces oiseaux secouent leurs ailes engourdies par le repos de la nuit. L’écureuil trottine, grimpe jusque sur les cimes les plus hautes des érables. Il se balance au bout d’une branche. Ici, assis sur son derrière, il grignote des noix qu’il tourne et retourne de ses deux petites pattes de devant. Là, il darde ses noires et pétillantes prunelles sur les lièvres, qui filent comme un trait parmi les hautes herbes.

Au loin, le son sacré d’une cloche invite les fidèles à aller offrir au Seigneur les prémices du jour.

Absorbé dans ses pensées, Hubert ne voit rien, n’entend rien. Aussi, est-il tout surpris de se voir chez lui si tôt. Cependant, il a marché pendant plus d’une heure.

— Maintenant, dit-il, faisons comme tout bon Canadien doit faire.

Il ôte son frac et ne garde que son gilet. Il se met les pieds à l’aise dans de légères pantoufles. Après avoir jeté deux énormes bûches dans l’âtre, il bourre sa pipe de terre blanche et l’allume avec le billet destiné à Florence. Puis il s’assied confortablement devant la cheminée, en disant avec un soupir de satisfaction :

— Console-toi, mon garçon ; ton étoile brille encore !