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LE FER À CHEVAL DE MA TANTE JOSÉPHINE



Je n’ai jamais vu autant de jolies filles qu’à Trois-Rivières, mais, d’un autre côté, un si grand nombre de filles à marier. Pourquoi ? Je me le demande. Peut-être parce que dans les petites villes on connaît aussi bien les défauts que les qualités d’un chacun. Et cet état de choses remonte très loin, s’il faut en croire l’histoire que me raconta ma tante Joséphine, une après-dînée d’hiver que j’étais assis à ses pieds près de la cheminée où flambaient de grosses bûches.

Ma tante Joséphine avait dû être ravissante dans l’épanouissement de ses vingt ans, à en juger par ses restes qui sont gravés dans ma mémoire.

Je revois encore sa petite personne gracile, délicieuse comme une figurine de Tanagra, presque perdue dans le grand fauteuil de damas vert. Qu’elle était digne et aimable, avec ses bandeaux de neige et sa coiffe de fine dentelle, ses yeux perçaient encore, à soixante-dix