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Rosalyne allait, gracieuse comme un colibri.

Elle était belle, très belle et n’avait pas vingt ans.

De ses yeux bruns, si purs qu’ils en étaient troublants, débordait une jeunesse toute de candeur et d’attirance. Si mignonne et si fraîche était sa bouche que l’on n’aurait pu qu’y becqueter des baisers.

L’ovale aux traits fins était somptueusement encadré d’une chevelure d’or fauve. La physionomie ouverte reflétait toute son âme ; il s’en dégageait une éternelle bonté qui appelait les regards et gagnait les cœurs.

Rosalyne, malheureusement, souffrait d’une de ces natures de femme et d’enfant que la plus légère peine fait pleurer. Il règne tant de tendresse et de sensibilité au fond de leur être, qu’un réel chagrin les abat avec la même violence que la grêle fauchant en pleine vie les épis d’or.

***

La jeune fille se baissait pour cueillir une marguerite — la marguerite que l’on effeuille quand on a vingt ans — lorsqu’elle fit entendre un petit cri de fauvette effarouchée. Deux mains s’étaient posées sur ses yeux. Une voix caressante ayant aussitôt demandé : qui suis-je ? elle reconnut le bandeau d’amour qui emprisonnait ses yeux.

Rosalyne se dégagea lentement, et tout bas :

— Julien ! dit-elle.

Celui-ci sourit sans mot dire, mais quel sourire ! Il contenait tout un monde d’amour, d’espérances et de promesses.