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Bref, il s’était blotti tant bien que mal, plutôt mal que bien.

— Nous y sommes ? demanda l’homme au volant, le front grave, le regard sondant la route, plein de fierté.

M. Robichon, ça se voyait, avait conscience de la responsabilité qui pesait sur ses épaules.

Qu’il était beau ! Une lueur d’attendrissement passa dans les prunelles de l’épouse.

— Vas-y, Balthazar, dit-elle.

***

Balthazar y va.

Grisé par la maladie de la vitesse qui s’empare des moins téméraires, il accentue l’allure endiablée de sa machine qui soulève sur son passage un tourbillon de poussière. Les chevaux se cabrent, les poules se sauvent avec des gloussements de détresse, les chiens aboient, les « habitants » tempêtent.

Et l’automobile va toujours.

Charles, soudain, pousse un cri d’épouvante.

À un tournant de la voie masqué par un orme qui penche en avant sa tête géante, une jeune fille traverse la route en portant un seau de lait.

M. Robichon a tout juste le temps d’appliquer les freins. Pas assez vite cependant pour que la jeune personne ne soit renversée.