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toiture d’un rouge ardent. À droite, le long d’une haie, une longue file de peupliers droits comme des militaires en un jour de revue, leur ombre se prolongeant sur les prés clairs, à cause du soleil qui semble tout embraser avant de disparaître. Dominant la rivière, une vaste luzerne. Au centre, un chêne sous lequel est groupé un troupeau de vaches qui broutent avec paresse en agitant les cloches suspendues à leur cou.

Et cette enveloppante quiétude de la tombée du soir n’est troublée que par des pépiements espacés d’oiseaux, des hue ! et des dia ! qui éclatent dans les champs ou encore quelque voix hélant le passeur.

***

— Allons, ouste ! montons, commanda M. Robichon à sa famille, tandis que les badauds faisaient cercle autour de la voiture, comme s’il se fût agi d’une cage de Barnum pleine de bêtes exotiques.

Quand Mme Robichon eut hissé ses 250 livres dans l’automobile à quatre places, la voiture se trouva déjà joliment encombrée. Mais il y avait encore Mlle Prudence, M. Pancrace, le petit Robichon, la petite Robichon, et surtout M. Charles.

Le jeune homme se rendait bien compte, il est vrai, du ridicule de sa position dans cette arche de Noé. Mais, refuser l’invitation pressante de la fille du perruquier, il ne le pouvait.