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ÉPICHARME

introduit dans les divertissements dionysiaques, phallophories ou autres, ce principe vivifiant de l’action. Sans doute ses premiers essais furent informes ; on n’y trouvait rien qui ressemblât à une composition savante ; les acteurs entraient en scène sans ordre, improvisaient au hasard, se livraient à toutes leurs fantaisies. Mais ce n’était plus la répétition monotone d’une procession ou d’une pantomime à un personnage, indéfiniment représentée sous les mêmes formes ; il y avait pour chaque pièce une idée nouvelle, à laquelle se rapportait comme à un centre le jeu libre des acteurs. Cet effort d’invention fut suscité par des troubles politiques ; il naquit des excès d’un soulèvement populaire. Lorsque, secouant le joug du tyran Théagène et surtout achevant de s’affranchir de la dure oppression des nobles, le peuple, selon l’expression de Plutarque, s’enivra du vin pur de la liberté, ces ébauches de comédie furent une forme des représailles qu’il exerça contre l’aristocratie. On devine à quels emportements de violence et de grossièreté il s’abandonna sous l’inspiration du Bacchus plébéien. Cependant ces jeux désordonnés d’une muse populaire, c’était le commencement de l’art. Bientôt le Mégarien Susarion allait porter dans un dème de l’Attique le germe de ce qui devait être, un siècle plus tard, la comédie politique ; en même temps, Mégare Hybléenne recevait de sa métropole la tra-