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LA PASTORALE DANS THÉOCRITE

nature de sa mère, c’est pour lui reprocher de ne pas plaider sa cause auprès de Galatée dans leur élément commun, où elle peut l’approcher. C’est la cause pour laquelle, dans son dépit, il la menace de cette vengeance mignonne dont s’égaie Fontenelle, et se promet de lui dire, non pas qu’il a mal à la tête et aux pieds, comme traduit le critique français, mais que le sang lui bat à la tête et aux pieds, c’est-à-dire qu’il a la fièvre par tout le corps : ainsi il la fera souffrir comme il souffre lui-même. Ce trait, de quelque façon que le juge un goût sévère, achève de montrer quelles sont les conditions d’âge et, par suite, de complexion morale choisies par le poète : le Cyclope de la xie idylle sort à peine de l’enfance et en garde encore la naïveté. Cependant l’idée dominante, c’est le fond même de la légende sicilienne, l’amour malheureux de Polyphême pour Galatée.

Il y aurait, au point de vue de l’art, une curieuse étude de détail à faire. Nous avons dit que la xie idylle peut être considérée comme une répétition de la iiie ; répétition très modifiée, beaucoup plus riche que l’original, d’une inspiration plus puissante et plus haute, mais qui reproduit le même thème bucolique. Dans la première idée, il ne s’agit que d’un jeune chevrier qui vient chanter à la porte de sa maîtresse. C’est une charmante pièce de demi-caractère, qui offre le plus heureux mélange