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ÉTUDES SUR LA POÉSIE GRECQUE

répétitions, qui leur étaient imposées, mais qui présentaient à leur imagination, excitée par la lutte, des formes toutes prêtes à recevoir l’idée nouvelle.

Ces inductions se tirent de Théocrite lui-même. Nous n’avons point d’autres sources d’information : de copies très perfectionnées et très personnelles, il faut remonter aux originaux perdus. Et le fait est qu’on croit saisir chez le poète bien des éléments naturels qu’il a transformés et pliés à ses combinaisons. Il ne les emprunte pas seulement au bucoliasme ; il les prend en général dans la vie champêtre et les fait tous entrer dans des compositions tout entières de lui. Lisez, par exemple, la chanson de moissonneurs qui termine la xe idylle :

« Déméter, déesse des fruits abondants, des nombreux épis, puisse ce travail être facile et la moisson productive !
Serrez vos gerbes, botteleurs, de peur qu’un passant ne dise : « Les lâches ! voilà bien de l’argent perdu ! »
Tournez la coupure des chaumes vers Borée ou vers Zéphyre : ainsi l’épi s’engraisse.
En battant le blé sur l’aire, fuyez le sommeil de midi : c’est l’heure où la paille se fait le mieux.
Commencez la moisson quand s’éveille l’alouette, cessez quand elle s’endort, reposez-vous pendant la chaleur.
Heureuse, mes enfants, la vie de la grenouille ! elle ne s’inquiète pas de celui qui verse à boire ; elle a de quoi boire en abondance.