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LA PASTORALE DANS THÉOCRITE

vrai chant de veillée comme ceux qu’y annonce Tirésias, ont un défaut plus ou moins marqué qui s’exagérera bientôt dans la grande composition d’Apollonius de Rhodes, c’est que le caractère en est indécis : ce sont des formes bâtardes de l’épopée, voisines tantôt des chants héroïques, tantôt des hymnes homériques, tantôt de ce qui va devenir l’idylle bucolique. Si Théocrite est devenu un poète supérieur, c’est qu’il s’en est dégagé ; c’est qu’il en a séparé cet élément champêtre, qu’il y introduisait volontiers, pour le traiter à part en le revêtant de formes particulières. Comme il arrive dans les créations littéraires de quelque importance, ce travail original eut pour point de départ et pour première matière de grossières ébauches et d’anciennes traditions conservées dans les mœurs. De même, ses mimes, son second titre de gloire, n’ont cette netteté et cette franchise d’effet que parce qu’en les écrivant il savait au juste ce qu’il voulait faire, et parce qu’il adapta le vêtement poétique à un objet bien déterminé, qui avait en soi un principe naturel d’existence, avant tout effort d’un art savant. Bornons-nous ici à parler de la pastorale, notre sujet.