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LE MÉLODRAME 51

nommé Sauton, et ce travail lui rapportait quelque quarante sous par jour. « Je m'en fais gloire », disait pompeusement Pixerécourt.

Cependant, le mauvais sort va être conjuré, et le 16 septembre 1797, Pixerécourt voit enfin une de ses pièces (il n'avait cessé d'en composer) affronter les feux de la rampe. Il ne s'agit que d'une comédie en un acte, que donne rx\mbigu (acteurs : Ricordeau, Bré- sille, les citoyennes Déperey et Dumonchel), les Petits Auvergnats.

C'est déjà tout son système, avec cette merveilleuse commodité d'exposition par un monologue, à la pre- mière scène, apprenant au public tout ce qu'il a be- soin de savoir, et le personnage comique mêlé aux héros de l'ouvrage, accablés par l'infortune, et jouant, au dénouement, le rôle de la Providence.

Le fermier Fliquet, après dix ans passés, est incon- solable de la fuite de sa femme, Théodine, qui disparut un jour après lui avoir laissé une sèche lettre d'adieux; et pourtant, il n'ose pas maudire l'infidèle devant ses enfants qui ne cessent d'appeler leur mère. Les évé- nements les plus imprévus remettent Théodine en présence de Fliquet. Mais comment pourra-t-elle se justifier? Vainement, elle raconte qu'elle fut enlevée « par le traître Rosambel et ses indignes amis », qui la forcèrent, le pistolet à la main, d'écrire la terrible lettre : « Mes efforts ne purent rien contre leur au> dace ; je fus entraînée et conduite dans un château où le scélérat n'épargna rien pour m'ôter ma foi... Une haine si constante l'irrita contre moi ; l'orgueil le ren- dit cruel; il me fit enfermer dans un horrible cachot, où je ne vécus que de pain et d'eau, et d'où je ne recevais le jour que par un étroit créneau...» Ce. pathé- tique récit émeut Fliquet, mais ne le convainc pas. C'est le comique qui fera éclater la sincérité de Théo- dine, en ouvrant un billet plein de menaces que lui envoie l'infâme Rosambel.