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48 : LE MÉLODRAME

Nancy se croisèrent avec lui dans les bureaux ins- tallés aux Tuileries, le reconnurent et le dénoncèrent. L'intervention de Carnot le sauva. Il ne s'était pas, évidemment, vanté de son passé d'émigré, mais il était assez piquant que l'ancien légionnaire de Condé, devenu commis au Comité de Salut public, expé- diât, de sa large écriture, les ordres prescrivant des mesures implacables contre les rebelles à la Répu- blique. Le major de Pixerécourt, le père inflexible qui avait exigé le départ de son fils pour Coblentz, n'avait pas prévu ce dénouement. C'eût été un sujet de comé- die, si le jeune auteur se fût avisé de penser à son cas, plus tard, pour le transporter à la scène, avec un de ces sous-titres qui lui étaient familiers, le Com- mis républicain ou les Hasards de la Vie.

Pixerécourt quitta Carnot qui lui avait été si bien- veillant, à la formation du Directoire. Il avait hâte

tagnes de la Suisse ; plus près, des montagnes moins élevées ; à droite, une petite cabane ; au milieu du théâtre, un arbre qui ombrage un banc et une table de gazon. Armand, vieux guerrier, est endormi sous l'arbre. Félix (son fils) le contemple : « Il dort encore ! Que son sommeil est paisible ! Mon père, tu souris : peut-être songes-tu à moi, ou, plutôt, tu médites quelque bonne action : ainsi l'honnête homme jouit, même en songe, et du bien qu'il a fait et du bien qu'il veut faire. Comme la joie anime son front serein, comme le zéphyr caresse ses cheveux blancs ! Je vais les couronner de fleurs. En s'éveillant, il les sentira sur son front. Je sourirai. Il s'attendrira. » {Il chante en cueillant des fleurs et formant une couronne) :

Jeunes amants, cueillez des fleurs

Pour le sein de votre bergère.

L'amour, par de tendres faveurs.

Vous en promet le doux salaire.

Plein d'un espoir encore plus doux

Dès que le soleil nous éclaire,

Je cueille des fleurs, comme vous,

Pour parer le front de mon père ! Et l'auteur de la Janibe de bois, tombant dans ce ridicule sen- timental, qui fait contraste avec les rnmonrs fie la rue et les tragédies réelles qui ont leur dénoupmfnt sur l relia faurl, est un homme qui passe pour infiniment spirituel, l'auteur des Lettres à Emilie sur la mythologie 1