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LE MÉLODRAME 45

chance de rencontrer un compatriote, nommé Michel, qui lui offre un coin dans sa mansarde de la rue du Bouloi. Il est dénué de ressources et les circonstances ne favorisent guère la recherche d'un emploi. Toutes ses sollicitations sont vaines.

C'est alors qu'il occupe ses loisirs forcés à écrire une pièce dont il a puisé le sujet dans une nouvelle de Florian, du sensible Florian, qui n'est plus le gentil Florianet de Voltaire, Selico. L'apologie de la race noire est dans la philosophie de l'époque, et Pixeré- court va porter Selico ou les Nègres généreux à Bap- tiste aîné (1), le véritable directeur du Théâtre du Ma- rais, bien que Courcelles soit encore en nom. Bap- tiste parcourt le drame, en fait quelque cas, invite le jeune auteur à le lire aux artistes. La démarche avait donc été heureuse, mais, en revenant chez lui, Pixeré- court passe devant le théâtre Molière. L'idée lui vient de faire l'épreuve de l'opinion de Baptiste. Il entre dans le cabinet de Villeneuve, le futur acteur de l'Am- bigu, le père noble par excellence, qui présidait alors aux destinées de la scène de la rue Saint-Martin.

Villeneuve lui demande de lui laisser le manuscrit et le convoque, dès le lendemain, pour une lecture à sa troupe.

Pixerécourt ne laissait pas d'être embarrassé; cette pièce sur laquelle il n'avait pas dû faire grand fonds,

(1) Dans son Dictionnaire théâtral ou Douze cent trente-trois Vérités, Harel portait ce jugement sur Baptiste aîné : « Comé- dien instruit, qui. dans le cours de sa longue carrière théâtrale, a joué presque tous les emplois tragides et comiques. Il a re- noncé à la tragédie et les premiers rôles de la comédie lui ont été plus favorables. Il est confiné, maintenant (1824), dans l'em- ploi des raisonneurs. Robert, chef de brigands avait commencé sa réputation, que soutiennent aujourd'hui les souvenirs du Dissipateur et du Glorieux. Qn ne peut pas dire que Baptiste aîné soit un grand comédien, mais on doit avouer qu'il a pos- sédé un véritable talent. C'est, d'ailleurs, un excellent profes- seur, s'il est vrai qu'on puisse professer un art où la pratique est le meilleur maître, après le génie naturel. »