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IS LE MÉLODRAME

reinplit presque à elle seule une publication de Ma- radan, la Bibliothèque des Romans^ cède au goût du jour et donne — elle qui a écrit un livre délicieux d'élé- gance, les Souvenirs de Félicité de L... — de sonribres histoires, le Château de Kalmeras, le Cimetière de Bury^ etc. Mme Cottin paraît raisonnable. Les pâles imitations suivent aussitôt une œuvre, qui, bien que désordonnée, a une manière de vigueur, et tout le monde refait le Moine, traduit de Lewis. C'est un soulagement que de retrouver la gaîté de Pigault-Le- brim, pour grossière qu'elle soit.

Le goût, si français, qui avait encore la toute-puis- sance dix ans auparavant, paraît perdu. On pense, on parle, on écrit faux. On ne s'habitue pas à être sevré des grandes angoisses par lesquelles on a passé, aux heures tragiques de la Révolution, et on les demande à la littérature courante. L'autre, la grande, celle qui aura la gloire d'avoir renoué les hautes traditions, ou d'avoir rénove, n'a encore pour public qu'une élite. La morale est bien indécise, les mœurs sont tombées fort bas, les nouvelles fortunes se sont faites d'une façon scandaleuse. Les âmes simples sont sans guide..

Peut-être n'est-il pas paradoxal d'avancer q.ue le mélodrame, tout en amusant, fut un aliment sain et opportun, et qu'il fortifia, avec ses leçons de morale en action, la conscience populaire. Nodier, qui avait des indulgences infinies pour Pixerécourt, parce qu'il l'aimait, et qu'il se plaisait toujours h justifier ses amis, a envisagé ce rôle du mélodrame, cette fonction qu'il rempht durant quelques années, à ce point de vue moral, ce par quoi ce grand lettré lui cherchait une excuse. « La chaire était vide, la tribune ne retentis- sait que de paroles inquiétantes, la théorie des intérêts matériels, avait remplacé dans les esprits Tiflée de toute autre destination... » Et Nodier ajoutait sérieu- sement : (( Où les hommes devaient-ils aller puiser des enseignements propres à les diriger dans les anxiét>és