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212 LE MÉLODRAME

Des artistes, cependant, sont apparus, qui étouffent dans la vieille formule, qui portent en eux l'avenir. Telle Marie Dorval, la grande Dorval, qui, avant que les poètes l'arrachent au mélodrame, aura dû se dé- battre pendant des années avec des œuvres étranges, la Cabane de Montaynard, les Catacombes^ les Pan- dours. Ah ! les Pandours, c'était le temps des aven- ttires d'une certaine robe, qu'elle racontait en sou- riant. Chaque soir, au théâtre, la robe servait à parer la princesse pandoure et, chaque matin, la princesse dépouillait la robe de ses ornements de strass et de clinquant, pour aller acheter incognito un frugal dé- jeuner chez la laitière du coin. Elle s'était présentée au Conservatoire, sans y être admise, mais on l'avait en- gagée à travailler les soubreftes ! En 1819, elle jouait à la Porte-Saint-Martin, les Chefs Ecossais de Pixeré- court (lady Helen). Malgré une fable puérile, les Deux Forçats ou la Meunière du Puy-de-Dôme, lui permet- tent d'attester sa sensibilité profonde. Quels sen- timents avait alors à traduire celle qui devait être Ma- rion de Lorme, Adèle d'Hervey, Kitty-Bell ! Mais les auteurs qui la tireront hors de pair, qui sauront dévoi- ler en elle des trésors de passion, ne sont pas encore venus, et, avec un autre compagnon dj chaîne, qui sera parfois son compagnon de gloire, Frederick Lemaî- tre, elle se doit contenter de Victor Ducange, de Benja- min Antier, de Saint-Armand et Jules Dulong. Pour- tant, les temps nouveaux sont proches. Un souffle d'art et de vérité passera, et combien de ces comédiens dont la foule avait fait ses héros, dépaysés soudain sur la scène de leurs anciens succès, ne paraîtront plus que des manières de fantoches î