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193 LE MÉLODRAME

du Temple sa façade à colonnes, surmontant un corps de bâtiment massif et un peu bas. La salle a été refaite par Cellerier, qui s'est flatté d'en avoir construit l'in- térieur « dans le goût gothique » (1), mais sept années de directions aventureuses et désargentées ont terni son éclat. Puis, par un revirement subit, la foule, pen- dant près de deux cents soirées, s'est pressée aux re- présentations de Madame Angot au sérail de Constanti- nople et les draperies et les peintures se ressentent de ce grand concours de peuple.

Il y a, à ce moment, une certaine indécision dans l'heure d'ouverture des spectacles. Le Censeur drama- tique, de Grimod de la Reynière fait campagne pour qu'ils commencent à sept heures ; ce gourmet aime à s'attarder à table. L'heure des repas s'est modifiée, d'ailleurs ; on dîne plus tard. Il n'est plus de bon ton de dîner à quatre heures (2). Mercier voudrait même que le spectacle ne commençât qu'à neuf heures. « La société, dit-il, ne sera bien perfectionnée qu'avec cette réformie. C'est alors qu'on pourra se livrer à des occu- pations suivies et marier le travail et le plaisir. » Mais le pubhc populaire, très nombreux, à qui le ren- chérissement de la main-d'œuvre a donné les moyens de satisfaire son goût pour le théâtre, tient à se cou- cher de bonne heure ; les petits commerçants et leur personnel forment le même souhait, u Les commis sont maussades, à trois heures et demie ; à quatre heures moins le quart, ils sont inabordables ; vingt fois, ils tirent leur montre pour ne pas donner une minute de plus h leurs fonctions et pour satisfaire à leur esto- mac (3). » On revient à l'habitude (qu'a appuyée un arrêté de police), de frapper les trois coups à six heures. Quelques années encore, et ce sera à cinq

(1) Almanach des spectacles, 1791.

(2) Prudliomine, Miroir de l'ancien et du nouveau Paris.

(3) Id.