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LE MÉLODRAME ^ 123

Ce Jugement de Salomon (26 nivôse an X ; acteurs : Révalard, Tautin, Boicheresse, Delaporte, Mmes Planté, Bourgeois, Lévesque, Corsse) rappelle bien l'avocat que fut Gaigniez ; c'est la défense d'une demi- innocence (car, moins rigide que Pixerécourt, il a un peu d'indulgence pour les fautes de l'amour) et avec des accents qu'il estimait pathétiques. Hélas ! qui prendrait, aujourd'hui, cette action au sérieux ? Qui accorderait encore quelque popularité au héros bibli- que ? Et d'ailleurs, Renan n'a-t-il pas fort entamé la légende de Salomon, en montrant en lui (( un roi pro- fane et dur au peuple » ?

Au demeurant, sur l'anecdote classique, Caigniez avait construit une intrigue qui ne manquait pas de quelque ingéniosité. Deux femmes se disputent un en- fant. Mais pourquoi ? C'est ce qu'il n'avait pas été em- barrassé de dire.

Une jeune Israélite, Leïla, a été séduite par un prince aimable et volage, Eliphal, qui n'est autre que le jeune frère de Salomon ; elle n'a connu le rang de l'homme qu'elle a aimé que lorsque celui-ci l'a quittée. Il lui laissait un vivant souvenir, qui la consolait de son abandon, et sur cet enfant, elle reportait la tendresse qu'elle avait vouée au père. Mais cet enfant lui fut volé.

La vieille nourrice de Leïla conte au jardinier de Sa- lomon — qui surveille les derniers apprêts de la fête donnée en l'honneur de la princesse d'Egypte Azélie, venue à Jérusalem pour épouser Salomon — cette la- mentable aventure :

Dkbora. — Ce qui fait surtout le désespoir de cette chère fille, f:'est d'avoir perdu, presque au Jendemain de sa nais- sance, l'enfant qu'elle aurait tant chéri.

MosAD. — Il est mort ?

Debora. — Non, à moins qu'il ne le soit depuis. Nous donnions toutes deux profondément, quand il lui fut en- levé : la main perfide qui commit ce vol avait laissé à "sa