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113 LE MÉLODRAME

mique fut des plus accidentées. « Pendant quatre an- nées, a écrit l'aucien secrétaire du théâtre, Pellissier, — une manière de savant, un philologue, que Pixe- récourt avait appelé à ce poste, par une reconnaissance de bibliophile, car Pellissier lui avait montré, chez Tacadémicien Raynouard, l'auteur des Templiers^ une édition de fables de La Fontaine, corrigées de la main du fabuliste — pendant quatre années, j'ai pu voir tous les prodiges enfantés par le génie administratif dont M. de Pixerécourt est doué, au suprême degré. C'était, comme il le disait lui-même avec un juste or- gueil, miracle sur miracle. Mais il est un qu'il ne fît pas : celui de faire naître la reconnaissance dans le cœur des artistes, sauvés par ses soins et ses efforts d'un naufrage imminent. Les ingrats ! à peine se vi- rent-ils dans une situation florissante, que, fatigués de la main habile et sûre qui les dirigeait, ils se liguèrent sourdement pour lui arracher le timon de leur frôle galère et que, par force d'inertie, ils parvinrent à s'en rendre maîtres de nouveau, mais pour retomber dans peu au milieu des écueils, où ils n'auraient point tardé à se perdre, si un pouvoir secourable n'était encore venu à leur aide. » En un style moins imagé, ce furent de sourdes luttes qui exaspérèrent Pixerécourt, pour- suivi aussi par la presse frondeuse qui, faisant allusion à ses mélodrames, l'appelait le terrible tyran Ferocios Poignardini (1). L'autorité le soutint, et il y a d'assez curieuses lettres du duc d'Aumont, premier gen- tilhomme de la Chambre, à Pixerécourt, lui enjoignant des « actes de vigueur ». Il en accomplit (cela était assez dans son tempérament) et, selon les instructions du duc, il (( pulvérisa » les principaux révoltés. Mais l'opposition persistait dans le personnel artistique du

(1) Le Corsaire, 14 avril 1826. — Quelques amis de Pixerécourt, notamment M. de Marchangy, lui écrivaient en l'appelant « mon cher tyran ».