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LES GUÉRÊTS EN FLEURS


Puis le sillon fini, chaudement éclairés,
— Comme un bronze immortel de Rodin ou de Rude —
Ils s’érigent, puissants malgré leur lassitude,
Sous les feux du soleil aux rayons azurés.

Ainsi, jusqu’à ce que la plaine disparaisse
Au sein de la pénombre envahissant les cieux,
Placides, ils iront le rêve au fond des yeux,
Sans qu’il ne leur échoie un instant de paresse.

Et quand l’homme, le soir, debout dans les labours,
Embrasse d’un coup d’œil l’œuvre encore incomplète,
Comme un vivant sosie, il voit sa silhouette
Sur le brun des sillons se mouvoir à rebours.

Par instant, il se penche, émiette quelque motte,
Soupèse tel ou tel de ces mille cailloux,
À fleur de sol, luisants comme autant de bijoux,
Et qu’il enfonce après du talon de sa botte.

Puis tout redevient calme : au loin, par les sentiers,
On entend dans le vent plein de parfums sauvages
Un beau groupe d’enfants revenant des fruitages
Rire quand l’un d’eux choit parmi les noisetiers.