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LE BAC


« Holà ! Passeur… ! » Alors, de l’une à l’autre rive,
Le vieux bac retenu par un cable d’acier
Trace, en fendant le flot, son sillon régulier
Vers la berge où la voix monte lointaine et vive.

L’onde glauque et rapide est âpre au batelier.
Qu’importe ! Lent et lourd, le vaisseau nous arrive ;
D’une perche s’aidant, l’humble marin active
À grands coups répétés son radeau familier.

Une pipe de terre aux lèvres, il bredouille
Des excuses : « Monsieur, c’est la faute à Gargouille,
« Mon chien, si je retarde, ah ! tonnerre d’un sac… ! »

Ainsi jusqu’à la nuit, l’homme, de sa salive,
Humectant ses deux mains d’une façon naïve
Poussera de la gaule, en fumant, son vieux bac.