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tente qui est le nôtre quand nous sommes dans le monde, et puis, docile, il va près de Grand’Mère.

Venez, mon ami, ils sont très bien ensemble, approchez-vous de moi, bâtissons une causerie de menus mots qui ne comptent pas et qui pourtant montent jusqu’au ciel…

— Vous souvenez-vous…

Le cher passé, le nôtre, plein seul de nos images rapprochées, déroule son magique ruban…

Oh ! quelle paix, quelle diffusion de douceur, quelle ivresse de se toucher des yeux, de la pensée, du sourire, de la voix…

Mais, voyez-donc…

Voyez-donc, mon ami, quel charme miraculeux émane de la Grand’Mère ! Comme elle est belle, tout-à-coup, animée, vivante ! Que lui est-il arrivé ? Elle regarde son petit-fils. Son visage s’amollit, se creuse en rides souriantes, en rides de jeunesse… Elle se penche, elle a des gestes vifs, il semble qu’elle pourrait se lever, courir avec Mika ! Voyez, ils se chuchottent, on les sent familiers, presque du même âge, comme si un lien mystérieux unissait ceux qui s’en viennent à ceux qui s’en vont… Le vieux visage douloureux s’éclaire au reflet de la jeune figure rieuse, mais d’une clarté plus chaude, une clarté d’eau forte…

Oh ! Grand’Mère a ri ! Rit-elle souvent ainsi ? Je