Crémazie
I
Ô Crémazie ! ô sombre destinée !
Ô dur exil ! ô tombe abandonnée !…
Par la Vie et la Mort
Tu fus trahi ; car même dans ta cendre,
Le Canada n’a daigné te défendre
Contre le sort.
Nous te laissions languir aux gémonies
Malgré tes chants, malgré les harmonies
Que ta voix modula ;
Mais une basse et dégradante offense
A cravaché notre reconnaissance,
Et nous voilà !
C’est plus qu’un nom, c’est toute la Patrie
Que le transfuge insulteur a flétrie
Avec ton souvenir ;
C’est sur nos cœurs indignés que retombe
Ce que l’injure a vomi sur ta tombe
Pour l’avilir.
Ô trépassé ! pour toi la Terre est tendre
En te donnant de ne pouvoir entendre
La voix des renégats ;
Mais par delà les vagues en démence,
Le cri d’un peuple, au fond du noir silence
Tu l’entendras !