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sera dans une édition ne varietur ; d’ici là, tous les changements me sont permis : pourquoi se presser ? »

Gill, sur le conseil de Boileau, remettait constamment son travail sur le métier ; il préférait revoir ce qu’il avait ébauché plutôt que d’y ajouter ; il se réservait de terminer plus tard… Il avait le temps. Un chef-d’œuvre ne s’improvise pas, il faut le porter une bonne moitié de sa vie dans son cœur et dans son cerveau. Il avait le temps… Et de ce poème qui, dans son esprit, apparaissait comme une espèce de « Jocelyn » canadien, plus orthodoxe que l’autre ; de ce beau rêve dont la splendeur brillait au fond de ses yeux bruns ; de ce grand effort littéraire par qui revivrait la glorieuse époque romantique, chérie entre toutes, ― voici ce qui fut réalisé…

M. l’abbé Olivier Maurault [1] ayant déjà dessiné le portrait de l’homme et judicieusement analysé l’œuvre, il ne nous reste guère qu’à rendre hommage à l’ami quotidien, à crayonner en marge certains détails peut-être ignorés du public.

Seuls ont véritablement goûté le caractère de Charles Gill ceux qui ont su mériter sa confiance, car il se méfiait et s’éloignait des hommes qu’il soupçonnait d’une équivoque arrière-pensée. Les étrangers, les connaissances de passage n’ont remarqué de lui que son extérieur un peu solennel, sa stature athlétique et sa tête d’empereur romain. À première vue, et à juste titre, on le taxait d’originalité supérieure.

L’artiste en imposait par un air de profonde gravité, une attitude de

  1. Charles Gill, peintre et poète, conférence donnée à Saint-Sulpice. ― On y trouvera un excellent résumé du plan du poème, et une brève appréciation des Étoiles filantes, poésies diverses.